Ojo de Agua, me revoilà. Cette fois je viens seule. Je devais aller à cette formation politique avec Ariel de la Red, mais à cause d’un problème de communication, je décide de ne pas attendre sa réponse qui ne vient pas, et saute dans le bus de nuit pour ne pas louper le début de la formation.

Je me rends compte alors, dans mon sac de couchage sur les fauteuils allongés du colectivo, que voyager seule me plait beaucoup. Je crois que ça me faisait un peu peur avant, dans un si grand pays que je ne connais pas. Mais cette nuit, je sens une plante de liberté pousser en moi, un grand vase d’oxygène gonfler mes poumons, et un sourire fleurir sur mes lèvres.

À Ojo de Agua, je retrouve l’Unicam, cette grande bâtisse en construction qui deviendra en août 2012 la Universidad campesina de agroecología. De nombreuses têtes connues, celles des jeunes de l’équipe infrastructura du campamento de Jóvenes, et des nouvelles aussi, que je découvre.

La formation dure quatre jours, et nous sommes répartis par petits groupes pour que les discussions soient plus fertiles. La première chose qui me frappe c’est le manque de dynamisme dans l’organisation de la formation, mais au fil des débats, je prends conscience d’une chose importante : il existe une grande différence entre les campesinos organizados (qui font partie d’une organisation militante) et les campesinos no organizados.

Je comprends alors que c’est au sein des organisations, mais aussi au cours de ce type de rencontres nationales, intercontinentales, et surtout interorganisationnelles, que les jeunes campesinos se forment sur l’histoire et l’évolution de l’agriculture familiale, qu’ils prennent conscience de la réalité politique du pays, et surtout de leurs droits. Ce lieu leur permet également, à travers de nombreuses discussions informelles, d’échanger sur leurs pratiques respectives.

À l’issue des quatre jours, pendant l’évaluation, notre petit groupe tombe d’accord sur le fait que de manière générale nous avons manqué de fond dans les discussions, et que pour atteindre un niveau de débat plus élevé, la formation devrait s’adresser à un public plus averti. La conclusion que nous en tirons est que pour que cela puisse avoir lieu dans les formations nationales, il est nécessaire avant tout de renforcer le travail de conscientisation à la base, au sein de chaque organisation.